Le Président Bassirou Diomaye Diakhar Faye s’apprête à suivre les pas de ses prédécesseurs, Abdoulaye Wade et Macky Sall, en supprimant deux institutions majeures : le Haut Conseil des Collectivités Territoriales (HCCT) et le Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE). Cette décision suscite des réactions diverses, notamment celle d’un professeur agrégé en droit constitutionnel, qui a préféré garder l’anonymat. Pour cet expert, « la suppression des institutions n’a jamais été efficace ou impactante dans l’histoire politique et institutionnelle du Sénégal ».
Une procédure familière, mais controversée
Le professeur rappelle que ce type de décision n’est pas inédit. Sous Macky Sall, en 2012, le Sénat avait été supprimé avec l’argument de réorienter les ressources publiques vers la lutte contre les inondations. Cependant, cette suppression s’était avérée temporaire et inefficace. Le Sénat fut finalement remplacé par le HCCT, démontrant ainsi une tendance à recycler les institutions sous une autre forme. Pour l’universitaire, ces suppressions successives reflètent une banalisation des institutions publiques au Sénégal.
Législatives anticipées : une stratégie risquée
Sur le plan politique, la suppression de ces institutions s’inscrit dans une dynamique plus large de légitimation du pouvoir exécutif. Le professeur souligne que le Président Faye a deux options : engager un dialogue avec l’Assemblée nationale et les autres acteurs politiques, ou imposer ses décisions sans concertation, comme cela semble être le cas actuellement. Cette dernière approche pourrait mener à des tensions, voire des blocages.
D’un point de vue juridique, la convocation d’une session extraordinaire de l’Assemblée nationale par le Président est légale, bien que certains la considèrent comme un manque d’élégance institutionnelle. Le professeur critique également le fait que la suppression du HCCT et du CESE pourrait être perçue comme une manœuvre politique, détournant l’attention de la Déclaration de Politique Générale (DPG) attendue du Premier ministre Ousmane Sonko.
L’histoire se répète
L’universitaire met en garde contre les illusions de rationalisation financière souvent invoquées pour justifier la suppression d’institutions. Selon lui, l’expérience passée démontre que ces mesures n’ont pas permis d’atteindre les objectifs annoncés, notamment en matière de création d’emplois ou de redirection des ressources publiques. En conclusion, il souligne qu’au-delà des arguments économiques, ces suppressions révèlent surtout une continuité dans la gestion politique du pays, marquée par une alternance incomplète où chaque nouveau pouvoir tente de s’assurer une majorité parlementaire pour mieux gouverner.
Pour cet expert en droit constitutionnel, la suppression d’institutions comme le HCCT et le CESE s’inscrit dans une tradition de réformes superficielles qui, malgré les promesses de rationalisation des finances publiques, n’ont jamais eu l’impact espéré sur la gouvernance et le développement du Sénégal. Le véritable enjeu réside dans l’organisation des prochaines élections législatives, qui pourraient bien redessiner le paysage politique national.