Le mardi 13 août a marqué une journée inédite dans le paysage médiatique sénégalais, où le silence s’est imposé comme un moyen de protestation. Journaux absents des kiosques, radios diffusant de la musique en lieu et place de leurs habituels bulletins d’information, et chaînes de télévision affichant des slogans de contestation : cette « journée sans presse » organisée par le Conseil des diffuseurs et éditeurs de presse du Sénégal (CDEPS) a retenti comme un cri d’alarme contre ce que les médias perçoivent comme une tentative de museler la liberté d’informer.
À l’exception de quelques médias pro-gouvernementaux, tels que Le Soleil et Walf Quotidien, la grande majorité des journaux, radios et télévisions ont participé à ce mouvement inédit. Les kiosques, habituellement fournis en quotidiens, sont restés vides, et les ondes de radios populaires comme RFM et iRadio ont laissé place à une programmation musicale. Les chaînes privées TFM, ITV et 7TV ont quant à elles remplacé leurs programmes par des images de solidarité : trois poings brandissant un crayon, accompagnés du message « Journée sans presse ».
Cette action de protestation fait suite à une série de mesures répressives prises par les autorités contre les entreprises de presse, accusées de non-paiement d’impôts. Le CDEPS dénonce des pratiques jugées abusives telles que le blocage des comptes bancaires, la saisie de matériel de production, et la rupture unilatérale de contrats publicitaires. Selon l’organisation, ces actions ont pour objectif de « contrôler l’information et de soumettre les acteurs des médias ».
Cette situation survient alors que le secteur des médias au Sénégal est déjà confronté à de graves difficultés économiques. Le climat de travail se dégrade, comme en témoigne la récente suspension des publications des quotidiens sportifs Stadeset Sunu Lamb, qui ont dû cesser leur activité après plus de deux décennies de présence sur le marché.
Selon Reporters sans frontières, cette journée de silence intervient dans un contexte préoccupant : 26 % des journalistes sénégalais sont privés de contrats de travail, et de nombreuses entreprises de presse croulent sous le poids des dettes fiscales, alimentant une crise de confiance entre les médias et le public.
Cette journée sans presse est un signal fort adressé au gouvernement et aux citoyens : la liberté de la presse, pilier essentiel de toute démocratie, est aujourd’hui menacée au Sénégal.